• Une histoire de départ, ou presque

    Comme à mon habitude je couple souvent les articles que je publie ici et sur mon autre blog.

    Aujourd'hui je cherchais le mot "départ" : il n'apparait pas dans cet article de Khaz, mais c'est impossible de ne pas le republier, tellement c'est profond :

     resilience.jpg

    [...] Dans une vie, la « quantité » de malheur est-elle supérieure à la « quantité » de bonheur ?

    Les évènements malheureux qui surviennent ont-ils plus de poids que les bons ?
    Peut-on les peser avec une Roberval, comme l’on ferait avec des cailloux blancs et d’autres noirs ? 

    Poser ainsi la question nous égare, nous entraîne dans une voie sans issue. Les « bonheurs » et les « malheurs » ne sont pas de même nature. Un don ne se pèse pas avec la même balance qu’une privation.
    La naissance d’un enfant n’est pas à comparer à sa mort. Sa naissance était apparition d’un être. La fin de sa vie ne supprime pas sa naissance. C’est la fin d’un parcours, fin prématurée. Mais sa naissance demeure un fait éternel, ineffaçable. Le monde, après sa naissance, ne sera plus jamais le monde d’avant.   

    Le bonheur, c’est un don de vie, c’est une présence, l’ouverture à un autre. C’est un soleil qui se lève. Le soleil qu'est l’autre. Ou qu’il peut devenir : c’est une promesse de relation. C’est aussi tout ce qui peut favoriser la rencontre de l’autre, d’un autre.

    Quand le soleil se lève le matin, c’est une joie. Pas le soleil par lui-même. Une étoile, c’est une boule de feu… j’en fais quoi ?
    Mais la venue du soleil me réchauffe (don de vie) et établit le jour : je vais pouvoir « voir », rencontrer, les autres. 

    Remarquons que deux amants, s’ils n’ont pas encore faim de pain et de beurre, ne désirent pas forcément que le soleil se lève rapidement. La rencontre avec l’autre, ils sont en train de la vivre. Pour l’instant le soleil peut bien rester couché !!!! Leur soleil, c’est leur relation.  

    Le bonheur, c’est d’avoir deux jambes pour marcher vers l’autre, ou une voiture pour pouvoir lui rendre visite, ou de l’argent pour lui offrir le restaurant, ou une maison, ou élever les enfants qui pourront venir…  

    Le bonheur, c’est toujours une relation. Une relation espérée. Une relation en train de s’épanouir. Et certes, elle n’est jamais achevée.  

    Le bonheur, c’est l’acquisition d’un nouveau moyen de relation. 

    Par exemple un appareil photo. Car si je fais des photos, c’est bien pour les montrer. 

    Ou par exemple une nouvelle recette de cuisine. Si je l’apprends, c’est bien pour partager le nouveau plat avec quelqu'un. 

    Ou encore l’apprentissage d’un instrument de musique… pour la même raison. 

    Un couple humain n’est heureux que s’il avance sur un chemin neuf : celui de la découverte de l’autre.  

    Si ce désir de découverte s’éteint, si l’espoir de découvrir le mystère qu'est l’autre se tarit, le couple entre dans le malheur. Ou au moins dans la tristesse et l’ennui…. On continue à vivre ensemble, mais on s’emmerde !   

    *****
    Alors, en cas de malheur, on fait quoi ?  

    Nous parlons des grands malheurs, dont on dit qu’ils créent des plaies qui ne peuvent se refermer. Le mot n’est pas heureux.
    Ces grands malheurs modifient le monde d’une façon définitive : oui.
    L’état antérieur est irrécupérable : oui.
    Mais faut-il parler de plaie ? De plaie inguérissable ?
    Si la plaie demeurait béante ….cela signifierait que la vie s’est totalement arrêtée, comme dans le château de la Belle au Bois Dormant.
    La plaie se cicatrisera si la vie reprend son cours, c’est-à dire si le sujet, contraint par la réalité, accède à un niveau supérieur d’« être ».  

    Cette capacité de résister, et de se transformer, ce doit être cela que l’on appelle maintenant résilience. Je ne m’intéresse pas trop à ce mot à la mode. Mais j’avoue que le défi que la vie peut, en somme, proposer à quelqu’un, ou plutôt imposer, et sans préavis, a quelque chose de vertigineux. D’une brutalité inouïe. 

    Elle exige de l’individu une évolution gigantesque ! Elle lui demande, comme une sphinge sans pitié, de comprendre ce qu’est la présence dans l’absence…… 

    Mutation de l’intelligence qui semble de prime abord impossible. Exigence presque surhumaine !  

    Je comprends que beaucoup échouent devant ce gouffre. Et cherchent à fuir (médicaments, oubli, divertissements, repli sur soi…). Je comprends aussi que beaucoup cherchent à s’éloigner des endeuillés, et des grands traumatisés de la vie. Comme on s’éloignerait d’une falaise qui menace de s’effondrer. 

    Une autre attitude est heureusement possible ! Car le rétablissement de la joie de vivre l'est aussi.  

                                                               lever-de-soleil-epis-.jpg


    La mort n’arrêtera pas la vie ! 
    [...]


  • Commentaires

    1
    Danielle
    Dimanche 2 Juillet 2023 à 18:38

    Que d'émotion à la lecture de cet article ! Khaz l'a écrit en 2012. Un texte très sensible, très humain... des mots qui m'ont touchée énormément.

    J'étais anéantie par un terrible drame, entièrement détruite, la douleur n'était supportable qu'à l'aide de médicaments (qu'il appelait "un piège destructeur") mais sans lesquels je glissais au fond d'un gouffre. Il voulait me redonner foi dans la vie, que j'arrive à croire à la victoire et m'ouvrir à nouveau à la vie. Je n'y croyais pas du tout, nous discutions pendant des heures... et pourtant cette immense souffrance s'est adoucie, j'ai été plus apaisée mais différente toutefois, blessée à jamais. Merci à lui de m'avoir permis d'avancer, il nous manque beaucoup. Bonne semaine, bonnes vacances à tous. Danielle

    2
    nuidra
    Dimanche 2 Juillet 2023 à 21:04

    Je reste sans mot, j'écris parfait, en accord parfait, les quantités de bonheur de de malheur ne s'additionnennent pas;

     

    BRAVO   

    3
    FAN
    Lundi 3 Juillet 2023 à 17:13

    Ce post date de 2012 et Pinson déplumé ne m'avait pas encore interpellé!! Les drames qui traversent nos vies font partis de la vie!! On aimerait vivre toujours l'Eden!!Hélas, la nature nous a créée avec un certain nombres de neurones au départ, puis, de plus en plus pour que l'on pense à notre confort physique et psychique!!Hélas, elle a aussi fait de l'humain à deux pattes , un être orgueilleux et vaniteux!!Hélas!! Aussi, celui-ci  ne comprend pas qu'il puisse partir vers la mort et souffre, bien sûr de voir les aimés partir définitivement sans espoir de retour!! Heureusement, il y a quelques neurones de résistance qui font lutter pour continuer le chemin de vie que la nature nous offre!!! Merci Dame nature!!! Bisous Fan

    4
    Mardi 4 Juillet 2023 à 11:25

    ... bonjour Kasimir, mes Martinets se préparent pour le "départ" dans le sud, les jeunes et adultes. Et merci pour cet article de 2012, (oui, je lui parles souvent...) et je dédie la chanson d'un groupe d'américain à tous, "Let your love flow"! Merci Dominique!

    5
    Le nez o vent
    Dimanche 23 Juillet 2023 à 09:43

    Bonheurs et malheurs font nos vies

    Merci pour cette belle page de Pinson

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